jeudi 12 juin 2008

Rêve new age

automne 1993
REVE

"Bienvenue à l'Institut de la Lucidité et à son enseignement de - Lucid Dreaming (marque déposée) - . Le but de cette méthode est de vous entraîner à avoir de fréquents rêves lucides..." Les premières phrases du livre de formation que Stephen LaBerge destine à ses ouailles sont aussi limpides que l'azur qui surplombe Stanford en ce matin d'été... Car en Californie le vent vient de l'Ouest, méticuleux, déchiquetant chaque jour les brumes humides du Pacifique. Ce faisant, il effleure aussi les collines, au sud de San Francisco, et vaporise sur les campus cet air étrange et léger, cristallin, qui donne des ailes aux plus blasés.

"Le rêve lucide c'est tout simplement quand vous rêvez et que vous prenez conscience du rêve, en direct. On peut s'entraîner à faire durer cet état, et aussi apprendre à contrôler le processus du rêve, à intervenir sur les situations..."

Entre deux âges, mais définitivement doté d'une mine d'adolescent, LaBerge nous introduit à l'intérieur de son saint des saints : un minuscule laboratoire de deux pièces, situé dans la cave du bâtiment principal de la prestigieuse et très technologique université de Stanford. Le local n'est guère impressionnant. Pour l'essentiel, un cabinet noir, cocon isolé des bruits du monde, est orné d'une chaise longue. C'est là que les rêveurs s'assoupissent, enturbannés d'électrodes, pour livrer aux machines inquisitrices les détails intimes de leurs songes. Quelques écrans d'ordinateurs sont là, qui veillent et affichent les courbes des signaux électrique émis par les cerveaux, et des coupes colorées se succèdent en rafales sur les écrans, dénonçant quelles zones cérébrales sont activées...

Des travaux "secrets" sont en cours ici, concède le maître des lieux, qui visent à localiser en trois dimensions les régions du cerveau activées pendant le rêve lucide, mais aussi à explorer les divers "niveaux de conscience" que peut offrir cette pratique...

L'intérêt du rêve lucide,
du moins aux yeux de LaBerge, est double. Explorer autrement la zone interdite de l'onirisme, de ses mécanismes, pour commencer. En supposant que le rêve "éveillé" est de même nature que celui qui refuse de se laisser vivre en direct, on tiendrait là un formidable outil à visiter, à comprendre les mécanismes du rêve. L'autre avantage serait d'aborder la question : à quoi sert-il de rêver chaque nuit en moyenne deux heures durant ? Est-ce là un accessoire ou un élément essentiel de notre vie ? Un terrain où les avis sont très partagés.
Mais d'abord, peut-on être certain que l'on est bien plongé dans un rêve lucide ?

"Ce n'est pas simple, concède LaBerge. La conscience de ce que l'on est en train de faire est un phénomène complexe, et suspect. On ne peut prendre une simple affirmation, un récit de réveil pour argent comptant. Mais nous avons trouvé un procédé quasi infaillible. Nous convenons d'un code avant le sommeil, toujours le même. Et lorsque le dormeur est conscient de son rêve, il fait le signe..., en direct."

Deux mouvements des yeux, alternativement vers la droite et la gauche ont ainsi été retenus pour établir le contact entre l'Atlantide onirique de l'assoupi et les machines analysantes et scrutantes du petit labo. Essentiellement parce que des électrodes sont déjà placées près des paupières closes : les mouvements des yeux, intenses et erratiques sont en effet caractéristiques de l'une des phases du sommeil, le REM (Rapid Eyes Movements) ou sommeil paradoxal (périodes de vingt minutes en moyenne, toutes les quatre vingt dix minutes), pendant laquelle, tous les chercheurs en sont désormais convaincus, le rêve a lieu. Paradoxal car bien qu'endormi au sens habituel du terme, le cerveau est en fait biologiquement bien plus actif que lorsque nous sommes "éveillés".

Par cette technique, LaBerge a montré que l'on pouvait prendre conscience de ses rêves : les signaux convenus des mouvements oculaires sont bien sur les tracés de REM, alors que s'il y avait éveil lors de cette prise de conscience, les courbes montreraient également le sommeil s'interrompant...

Le chercheur fit de cette trouvaille le big bang de sa propre quête. Est-il possible de prendre conscience de tous ses rêves, se demande-t-il depuis dix ans ? La réponse, il en est convaincu, est oui, mille fois oui. Il suffit de se le suggérer, fortement.
"La prochaine fois que je rêverai, j'en prendrai conscience", faut-il se répéter. Il convient également de mobiliser sa conscience en état d'éveil (se dire "je suis conscient" le plus souvent possible dans la journée), et de suivre les conseils et exercices de la méthode évoquée plus haut, qui évoque celle, plus ancienne, du Dr Coué.
Une autre recommandation : investir dans une paire de lunettes "DreamLight" (marque déposée). Leurs petites pulsations lumineuses, déclenchées pendant les périodes de sommeil paradoxal, sont taillés pour être captées par le cerveau pendant les périodes de REM.

"Une lampe de chevet se mettra à clignoter, la foudre à tomber. Ce sera votre façon, en cours de rêve, de percevoir le signal émis par les lunettes, et vous prendrez conscience du rêve", pronostique LaBerge.

AJOUTS (2)
Et aucune inquiétude à avoir : tout le monde peut rêver éveillé, plus ou moins bien, souligne Stephen. Pourquoi ? Et bien tout simplement car notre conscience elle-m^me n'est qu'un rêve, me^me quand nous avons les yeux ouverts. la manière dont le creveau reconstitue le monde est un songe, aux yeux de LaBerge.
"Pourquoi voulez-vous que ce processus s'interrompe la nuit ? Le r^ve nocturne est la suite du rêve diurne, il est différent car le fonctionnement biologique du cerveau n'est pas le même pendant le sommeil, mais c'est bien pour cette raison qu'il est possible d'en prendre consience, de le visiter", insiste le chercheur
FIN AJOUTS (2)

Il en coûte 5000 francs environ, pour acquérir l'engin bricolé dans le mini-atelier de l'Institut...






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